Le paysan et le gentilhomme

Bonjour la compagnie,

Dès son plus jeune âge Winston Churchill rêva de parcourir le monde en faisant son possible pour chatouiller la camarde sous le menton. Il y réussit plutôt bien. Il commença jeune, ainsi vers huit ou neuf ans, il manqua de se noyer en s’aventurant dans un lac marécageux du côté de Mochfield en Ecosse. Il aurait été englouti si un paysan du voisinage, père de huit enfants ne l’avait sorti de ce mauvais pas.

Le lendemain du sauvetage le père de Churchill se présenta en grand équipage devant la chaumière et demanda au pauvre homme qui s’appelait Fleming le moyen de lui venir en aide après cette belle action. Comment pouvait t-il le remercier ?

Celui-ci répondit qu’il n’avait besoin de rien et que venir en aide à son prochain, qui plus est un enfant était une chose des plus naturelles. Cela ne méritait aucune considération particulière. Le père de Churchill, Randolph voyant entrer le fils de la maison, de l’âge de Winston, lui fit la proposition suivante.

« Je vais offrir à votre fils le même niveau d’éducation qu’au mien ! ». Il tint parole et le fils Fleming fit ses études dans les meilleurs établissements britanniques et fut diplômé de l’hôpital Sainte-Marie de Londres. En 1927 son prestige ne connut plus de limites, il avait découvert la pénicilline. Il était devenu Sir Alexander Fleming.

Sir Winston Churchill et Sir Alexander Fleming restèrent amis toute leur vie et reposent tous deux dans le même cimetière londonien.

A bientôt pour de nouvelles aventures.
Donec 

Autopsie d’un crash

Bonjour la compagnie,

Le transport aérien est aujourd’hui extrêmement sûr. Il est même souvent nécessaire de donner un petit coup de missile pour que l’avion s’écrase. Nos amis russes ou iraniens maîtrisent parfaitement le sujet.

Il n’en était pas de même dans les années cinquante où les Dakota et autres SE161 Languedoc  n’hésitaient jamais à écrabouiller leurs passagers.

Ainsi le 3 mars 1952 le Languedoc d’Air France de la ligne Nice-Paris est venu terminer sa course (et celle de ses passagers) dans une orangeraie à deux pas de l’avenue Saint-Augustin non sans avoir rasé le palmier qui ornait la cour de mon immeuble niçois.

Le SNACASO Languedoc  était une de ces machines conçues à la veille de la guerre et passablement dépassées en 1946. Pourtant afin d’entretenir la capacité de production de notre industrie aéronautique une chaîne de montage fut relancée en 1945. Sa mise en service souffrit de maux récurrents dont la fragilité du train d’atterrissage n’était pas le moindre. Quand on connait la modernité du matériel américain de cette époque on se doute que le Languedoc était difficilement vendable. L’Etat l’imposa donc à des compagnies sur lesquelles il avait la main, à commencer par Air France qui le destina à des lignes intérieures. Mais son remplacement par des Douglas DC4 ne tarda pas.

Le 3 mars au matin notre Languedoc décolle de l’aéroport de Nice mais au lieu de poursuivre vers la baie de Anges, il vire sur les collines, survole le quartier de la Madeleine et va s’écraser dans l’orangeraie tout à côté des studios de la Victorine. Une explosion formidable retentit et immédiatement l’avion se transforme en brasier. Il est 9h05. Des 38 passagers et de l’équipage il n’y a qu’une seule survivante, atrocement brûlée, la danseuse classique Marguerite Delpy. Comble de malchance l’ambulance qui la transportait se renverse rue Notre Dame faisant deux autres blessés graves.
Il s’avéra après enquête que la cause du drame était un aileron défectueux.

Parmi les miraculés qui ont eu la bonne idée de rater l’avion, il y a le prestigieux général Corniglion-Molinier, compagnon de la libération et ci-devant député des Alpes-Maritimes. Il avait été refusé à l’embarquement faute de place.

A bientôt pour de nouvelles aventures.

Donec

Hoche fait des siennes

Bonjour la compagnie,

Les projets insensés ont toujours titillé l’imaginaire romantique des Français. L’un d’eux particulièrement utopique fut élaboré en 1796 : envahir l’Angleterre à partir de l’Irlande.

Pendant la période révolutionnaire les anglais venaient en aide à tous les mouvements qui pouvaient affaiblir la France à commencer par l’insurrection vendéenne dont ils attisaient les flammes. Le général Hoche, un de ces enfants de la révolution qui parti de rien aspirait aux plus hautes fonctions eu l’idée d’une expédition en Irlande et sur les côtes du pays de Galles pour prendre ainsi les Britanniques à revers.

La « Force Noire » est constituée de trois groupes qui embarquent à Brest. Le premier, le plus important se dirige vers l’Irlande où la population catholique est la plus antibritannique qui soit. Les deux autres groupes sont composés d’une troupe hétéroclite, indisciplinée, ramassée dans les bas-fonds de Marseille. Ils débarqueront au pays de Galles à Fishguard. Leur rôle sera d’attirer l’attention des Anglais pendant que ceux d’Irlande procèderont à une levée en masse et se prépareront à envahir la Grande-Bretagne.

Mais au débarquement rien ne se passe comme prévu. La troupe des marseillais de sac et de corde pille les villages voisins. Les autres, commandés par un Irlando-américain, William Tate, va se colleter avec des milices britanniques, des marins et la population. Le costume féminin des paysannes de la région comportait une jupe noire, un châle rouge et un haut-de-forme. Quand les Français les voient apparaitre au sommet des collines, ils croient que ce sont des « redcoats », soldats d’élite britanniques. Ce qui explique la défaite, leur fuite et leur capture… D’autant que les bâtiments qui les ont débarqués sont partis sans demander leur reste.
Qu’en à la petite flotte qui fait route vers les côtes irlandaises, elle va être victime d’une terrible tempête qui la dispersera et contraindra les rescapés à rebrousser chemin.

La déroute est consommée.

Ajoutons quand même une petite note jubilatoire à cet échec douloureux. Les hommes de Tate sont faits prisonniers et enfermés à Pembroke. Ils sont ravitaillés par deux jeunes filles. Naturellement deux officiers français, vous savez comment ils sont, parviendront à les séduire et à s’enfuir avec elles. Les donzelles ayant tout prévu, ils embarquent sur un Yacht, propriété du seigneur local. La tête des traitresses est mise à prix et tout ce qui flotte dans les environs part à leur poursuite. Les amoureux abandonnent alors le Yacht pour un sloop qui faisait route vers saint Malo.
Le yacht alla se fracasser sur les rochers mettant ainsi fin aux recherches.
Epilogue heureux, les deux belles Galloise épousèrent leurs chers « frenchies ».
A bientôt pour de nouvelles aventures.

Donec

PS : merci à John qui m’a fourni l’anecdote

Nous venons d’apprendre la disparition du grand dessinateur PIEM le jour de ses 97 ans.

Nous nous souvenons tous, téléspectateurs d’autrefois, fidèle au « Petit Rapporteur » de son humour passablement corrosif dont a hérité d’ailleurs son fils Barrigue.

Il fut aussi un invité fidèle au festival Trait d’Humour de Saint Jean Cap Ferrat. Je joins une photo de son ultime passage sur la péninsule.
A Thierry Barrigue, son fils, nous présentons nos sincères condoléances.

Des gros malins ce Français

Bonjour la Compagnie,

SIMCA fut une marque française pleine de fantaisie, créée par Henry-Theodore Pigozzi en 1934 pour construire des Fiat sur notre sol.

Dans les années 50, l’environnement automobile français est assez triste. Les austères Peugeot, les pétaradantes et fragiles Panhard, les incertaines Renault sans oublier les fantasques Citroën, font de Simca une marque un peu à part. Elle nous proposait la joie de vivre à l’italienne. Qui ne se souvient de la Simca Sport, de l’Ariane, de l’Aronde, du coupé 1200 S et de la P60 Montlhéry.

En 1963 les choses se gâtent pour Pigozzi quand le nouvel actionnaire, la marque Chrysler le licencie sans ménagement. Le chagrin fera disparaître notre ami quelques mois plus tard. Ayant la barre bien en mains les américains avec une incompétence qui force l’admiration vont s’employer à faire « couler » la boîte. Pourtant lorsque l’état major américain débarquait à Poissy, ils faisaient sentir aux Français qu’ils n’étaient qu’une filiale dispendieuse. Ils fouinaient partout, prompts à la critique.

Pourtant l’état-major de Simca va de l’avant et prépare discrètement de nouveaux modèles. Il a installé en douce un atelier de pré-production. C’est un outil révolutionnaire qui permet de lancer des avant-séries pour régler les difficultés de fabrication. Seuls les Japonais possèdent une telle installation. Vous imaginez bien que tout a été financé avec des queues de budget dans le plus grand secret.

Les Américains de Chrysler viennent régulièrement inspecter leur usine avec un regard soupçonneux concernant ces Français roublards et à l’esprit tordu. Pourtant nos compatriotes ne ménagent pas la qualité de leur accueil, ils mettent les petits plats dans les grands. Le whiskey et le champagne coulent à flot. Ce jour-là les patrons doivent reprendre l’avion dans l’après-midi, les bagages sont entassés dans le bureau du directeur. Ils s’apprêtent à honorer la gastronomie française. Pourtant le matin ils étaient passés devant l’atelier de « pré-production » sans trop comprendre l’utilité du bâtiment. Ce mystère pousse le responsable de la délégation à prendre force photos qui illustreront son enquête.

Dans le brouhaha du départ et des libations apéritives le directeur français chuchote quelques mots à sa secrétaire. Quand tout ce beau monde est parti au restaurant celle-ci interpelle une collègue et avec mille précautions se dirigent, armées d’un coupe-papier vers le bureau où les bagages sont stockés. Elles se saisissent de l’attaché-case qu’on leur a indiqué et le forcent sans autre forme de procès. Elles n’ont plus qu’à prendre l’appareil photo, l’ouvrir, voiler la pellicule et tout refermer. Le tour est joué et l’atelier de pré-production sauvé pour un temps.

Elles s’en iront ensuite avertir discrètement leur directeur de la réussite de leur mission et de la disparition des preuves concernant l’atelier clandestin.

A bientôt pour de nouvelles aventures

Donec

Cette semaine « dessins sauveteurs »

La bataille de l’Authion

‌Bonjour la compagnie,

Il y a 75 ans, en avril 1945, avait lieu au sud des Alpes, dans le massif de l’Authion à quelques encâblures de Nice l’ultime affrontement de la guerre. L’affrontement débute le 10 avril 1945. Pourtant le Rhin avait été franchi le 24 mars et le 30 avril Hitler mettait fin à son aventure criminelle. Les carottes étaient cuites. Quel intérêt cette ultime bataille ces morts inutiles ? Qu’allait chercher le Général de Gaulle dans cette aventure sachant que les Alliés ne voulaient pas modifier les frontières alpines pour complaire au nouveau maître de l’Italie, le Maréchal Badoglio.
Outre Tende et la Brigue, je soupçonnais le général de s’intéresser avec insistance aux vallées piémontaises. N’a-t-il pas déclaré aux cadres de l’armée réunis à Beaulieu-sur Mer le 9 avril 1945: « Messieurs je suis au courant des sacrifices que je vous demande. La campagne qui s’ouvre sera pénible, je le sais. Elle vous ouvrira les portes du Piémont et vous conduira au Tyrol … Nous voulons reconquérir les frontières naturelles de notre pays. J’ai confié cette mission à la 1ère D.F.L. Demain vous allez attaquer, Bonne Chance. »
Pourquoi cette prestigieuse 1ere D.F.L. va-t4elle s’engager dans un tel combat, mal équipée, alors que son aventure prestigieuse la destinait à investir l’Allemagne.
Les cadres de la division sont amers et accusent le général De Lattre de Tassigny de s’être débarrassé d’eux à bon compte tout comme la 2ème DB envoyée soumettre la poche de Royan. Le fringant général leur reprochait d’être d’origine F.F.L.
 Cela dit le 10 avril les Français passent à l’offensive. Il est quatre heures du matin, nos soldats sont en tenue allégée, musette contenant un chandail, leurs munitions, les boîtes de ration « K ». Le pire de tout ce sont les chaussures à semelles de caoutchouc lisse inadaptées à la montagne.
 Vont suivre jusqu’au 26 avril une succession de combats souvent meurtriers où nos marins vont se distinguer. A l’initiative du capitaine de corvette Roger Barberot nous avons déployé dans cette « montagne à vaches » de petits chars américains « Stuart » dont l’efficacité ne sera pas à démontrer.
Malheureusement pour nous après tant de sacrifices, le 29 avril la route de Turin nous était fermée par les alliés qui eux entrèrent en vainqueur dans la capitale du Piémont. La D.F.L. ne quitta pas la France. Quant à Tende et la Brigue dont la population plébiscitait un rattachement à la France elle dut encore attendre deux ans.
Concernant nos marins, un monument a été érigé par la F.A.M.M.A.C* en 1962 sur la commune de Breil-sur-Roya. Le 2 octobre prochain nous monterons en délégation pour saluer la mémoire de nos braves.
La veille le jeudi 1er octobre aura eu lieu une conférence   sur les évènements de 1945 par le professeur Panicacci, salle de la maison des associations, place Garibaldi à 14 :00.
A bientôt pour de nouvelles aventures
Donec
F.A.M.M.A.C . : fédération des marins et marins anciens combattants

et l’Histoire vous prend au collet

  ‌Bonjour la compagnie,

Il est des moments dans la vie où il convient de ne pas faire les malins et de montrer une certaine souplesse surtout si l’on est dans son droit, bref la réalité doit être prise en compte. Pour illustrer mon propos je vais évoquer l’aventure de Marcel N..

Nous sommes en juin 1944 et il prend avec sa femme et ses deux enfants des vacances dans une petite ferme, à Engin près de Grenoble. Le village est en bordure du massif du Vercors, lieu comme chacun sait infesté de maquisards. Les Allemands de leur côté font la chasse aux jeunes qu’ils voudraient voir participer avec plus de passion à l’effort de guerre du Reich. Ils multiplient les rafles. On apprend à l’université de Grenoble qu’une colonne de la Wehrmacht après avoir détruit les maquis des Glières fait mouvement vers Chambéry pour faire subir le même sort à celui du Vercors.

De jeunes étudiantes sont alors envoyées à Engins pour mettre en garde la population et en particulier ceux des jeunes qui souhaitent échapper au STO*. L’alerte est donnée, les hommes doivent filer sans demander leur reste. Tous ceux qui sont en âge d’être arrêtés disparaissent sauf Marcel N.

Il n’est pas un terroriste, il n’a rien à craindre, ses papiers ont en règle. Il ne bougera pas malgré les objurgations de la messagère venue de Grenoble.

Quand le lendemain les Allemands surgissent dans la maison, il est là avec sa famille. Il leur raconte qu’il est de Grenoble, qu’il n’est pas un terroriste, qu’il est en vacances. Comme il parle un peu leur langue les Allemands l’écoutent mais l’emmènent pour vérification. Il ne reviendra pas et sera déporté. Il a voulu se soustraire à l’Histoire faire comme si la vie continuait comme avant mais celle-ci l’a rattrapé.

A bientôt pour de nouvelles aventures

Donec

STO : service du travail obligatoire
Et merci à Marc Ferro qui nous a fourni l’anecdote