Le professeur Louis Rougier fut un personnage très controversé. Il avait prétendu avoir rencontré secrètement Lord Halifax le 24 octobre 1940 pour négocier un traité secret où Churchill acceptait de laisser la France s’approvisionner dans ses colonies et nos bateaux de commerce transiter par Gibraltar. Par ailleurs le BBC se refuserait à attaquer la personne du Maréchal Pétain.
Le professeur est à Londres pour négocier cet accord et nous livre un portrait de l’Angleterre autrement plus dynamique que celui de la France vaincue et désespérée.
Laissons parler le professeur : « Je quittais la capitale anglaise à regret. En dépit des bombardements ou plutôt à cause d’eux, on y respirait cette frénésie de vivre que donne l’imminence d’un danger qui peut d’un instant à l’autre abréger vos jours, tout en ayant une faible probabilité de vous atteindre. On y respirait l’haleine heureuse d’un peuple fier qui combat pour la liberté du monde, avec l’obstination farouche du plus élémentaire instinct vital. Le manque d’imagination masquait aux Anglais l’ampleur de l’effort à accomplir ; cependant que l’éloquence de leur leader épique les stimulait comme un grand vent du large.
Deux certitudes s’étaient imposées à mon esprit. Jamais par les seules ressources de l’aviation, les Allemands n’arriveraient à bout de la résistance anglaise : au rythme d’alors il faudrait dix ans d’un pilonnage égal et continu pour niveler la moitié de Londres. Jamais le peuple britannique n’abdiquerait. Je songeais combien un simple accident géologique, comme le canal, peut modifier le tempérament et le destin d’un peuple. Parce que l’Angleterre avait été protégée par les mers des guerres continentales, les mêmes institutions féodales qui avaient conduit la France à la monarchie absolue, à la centralisation du pouvoir, au colbertisme avait produit en Angleterre le parlement, la décentralisation, le free Trade. De nos jours le même accident géologique faisait que les Anglais pouvaient combattre à visage découvert, tandis que la France s’organisait en lutte silencieuse, patiente et inégale, la lutte aux rages rentrées, aux dents serrées, aux bouches closes, des undergrounds militants ».
A la semaine prochaine
Donec
Oxymore : figure de style qui consiste à lier deux mots de sens contradictoire
Je joins le « JOURNAL de la PASSERELLE » édité par l’AMMAC de Grasse qui fourmille d’informations intéressantes
Le journal de la passerelle N-10 pirate (1)